II- La préexistence de l’Imâm
« L’Imâm-Preuve existait avant les créatures »
L’Imâm Ja’far as-Sâdiq
Pour commencer cette partie, il me semble utile de rappeler rapidement quelques données de base que la quasi-totalité des études consacrées à l’imâmisme n’ont pas manqué de souligner. La doctrine imâmite est entierement dominée par l’ensemble sacré formé par le Prophète Mohammed {sawas}, sa fille Fâtima{as} et les douze Imâm-s {as}, et appelé « les Quatorze impeccables » (ma’çum) ou « les Quatorze Preuves » (hujja).
Ces personnes forment une totalité qui, à elle seule, reflète fidèlement les deux aspects sous lesquels, selon le shî’isme, la Vérité Divine (al-haqq) se manifeste aux humains : un aspect obvie, apparent, exotérique (zâhir) qui enveloppe un second aspect secret, caché, ésotérique (bâtin).
L’éxotérique de la Vérité est manifesté par la prophétie législatrice (nubuwwa), apportant à la masse des hommes (‘âmma) un Livre sacré « descendu du Ciel » (tanzîl) ; Mohammed est aussi bien le prototype que l’aboutissement de ce premier aspect.
L’ésotérique de la Vérité est révélé grâce à la mission imâmique (walâya), accompagnant chaque mission prophétique, apportant à l’élite des croyants (khâssa) la seule vraie herméneutique (ta’wîl) du Livre sacré ; l’ensemble des douze Imâm-s en général et plus particulièrement ‘Alî {as}, considéré comme le père des onze autres, sont la manifestation plénière de ce second aspect. Fâtima, appelée « le Confluent des deux lumières »(majma` al-nûrayn), reflète le « lieu » de rencontre des deux aspects.
Le prophète (nabî) possède lui aussi bien entendu, la connaissance de l’ésotérique de la religion ; il est donc également walî mais il réserve exclusivement son enseignement ésotérique à son (ou ses) imâm(s) ; par contre, l’imâm n’est jamais considéré comme nabî. Cette précision est nécessaire puisqu’il faut savoir que dans les textes imâmites, des termes tels que walî, hujja, ûlû l-amr etc. généralement réservés aux imâm-s, s’appliquent parfois aussi aux prophètes.
1- Les mondes d’avant le monde. Le Guide-Lumière
L’Evénement a eu lieu quelques milliers d’années avant la création du monde.
Dans un « lieu » immatériel appelé La Mère de Livre (umm al-kitâb), Dieu fit jaillir de Sa propre Lumière un rayon lumineux duquel Il{swt} fit procéder un second rayon ; le premier était la lumière de Mohammed, celle de la Prophétie (nubuwwa), de l’exotérique (zâhir) ; le second , de nature identique mais subordonné au premier, était la lumière de ‘Alî, celle de l’imâmat ou de la walâya, de l’ésotérique (bâtin).
« Deux mille ans avant la création, Mohammed et ‘Alî étaient une lumière devant Dieu- qu’Il soit glorifié et exalté-, lumière formée d’un tronc principal d’où partait un rayon resplendissant…
Dieu dit alors : « Voici une lumière [tirée] de Ma propre Lumière ; son tronc est la prophétie et sa branche, l’imâmat ; la prophétie revient à Mohammed, Mon serviteur et messager et l’imâmat revient à ‘Alî, Ma Preuve et mon Ami. Sans eux Je n’aurais rien crée de Ma création… C’est pourquoi ‘Alî répétait toujours : « Je proviens de Mohammed [ou de Ahmad] comme une clarté provenant d’une autre.»
(Tradition remontant à Ja’far, Ibn Bâbûye, ‘Illal, bâb 139, p.174 ; pour les traditions d’autres imâm-s voir ibib, bâb 111, pp.131 sq)